CUNICULTURE
Magazine Volume 35 (année 2008) pages 81 à 83

ÉDITORIAL : Droit à l'information ou à la déformation ?

par
François LEBAS
Président de l'Association "Cuniculture"

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         Depuis le printemps 2008, quelques associations qui prétendent défendre les animaux ont lancé une attaque en règle contre la production du lapin. Cela a été en particulier le cas de la SPA connue par ailleurs pour la défense effective des animaux et d'une autre association appelée L214. Cette dernière association a été crée début 2008 par une quinzaine de personnes qui ont ni plus ni moins pour ambition que de faire stopper la production et la consommation de tous les produits d'origine animale : plus d'élevage, plus d'abattoir, plus de pêche non plus, on peut supposer dans le monde entier (source: interview de 2 des 15 membres fondateurs de cette association pour un journal de végétariens au printemps 2008 - lu sur le site Web de l'association).
 
 

      
      Avec un courage pour le moins discutable, plutôt que s'en prendre bille en tête à une production importante comme celle des vaches ou des porcs, ils attaquent avec véhémence la production de lapins non pas qu'elle soit pire ou meilleure qu'une autre filière animale mais simplement parce qu'elle est petite et donc plus facile à déstabiliser, à stopper, à détruire. C'est grand de s'attaquer aux petits sous le prétexte qu'on a plus de chance de gagner ! (cf.  l'interview précédemment citée). Si une cause est bonne on doit pouvoir la défendre sans distinction de partie.

 
 

     
      Pour encourager cette entreprise de destruction, la SPA a soutenu l'action engagée par L214 en diffusant les "informations" recueillies en particulier dans quelques élevages sans avoir informé les détenteurs de ces élevages de la nature de l'utilisation qui serait faite de ces informations. L'exploitation qui en a été faite reviendrait à décrire l'usage de l'automobile en ne montrant que des véhicules accidentés ou en risque d'accident, ou à réduire le travail de l'éducation nationale à la liste des accidents et agressions survenus lors de la présence des enfants dans les installations scolaires. La conclusion des personnes n'ayant que cette source d'information serait : il faut immédiatement faire cesser ce scandale et interdire la production, la détention et l'utilisation de tout véhicule automoteur type voiture, bus ou train, ou bien il convient de ne plus envoyer les enfants à l'école, c'est un lieu beaucoup trop dangereux.

 
 


       La déformation des informations récoltées de-ci de-là par L214, et reprises par la SPA, a d'ailleurs été telle que la cour d'appel de Paris a jugé nécessaire de condamner ces deux associations à la demande de l'interprofession cunicole (voir le communiqué de presse de du CLIPP reproduit ci-dessous).

 

 
 
 
 

 

Que penser de cette situation ?

 

 

Il ne faut surtout pas penser que la volonté de nuire à la filière cunicole a été éradiquée par cette décision de justice. Une bataille a certes été gagnée par l'interprofession cunicole, mais les opposants sont toujours sur le sentier de la guerre qu'ils ont déclaré unilatéralement. On peut toutefois espérer qu'à la suite de cette condamnation les responsables de la SPA réfléchiront à deux fois avant de soutenir une action finalement en totale opposition avec les actions de leur propre société: dans les refuges que la SPA a tant de mal à faire fonctionner, les animaux recueillis ne sont-ils pas en cages ? Alors pourquoi partir en guerre contre les cages des éleveurs de lapins alors que l'on met les animaux que l'on veut sauver (chien, chats, mais aussi lapins, etc...) précisément dans des cages ? Un peu de bon sens et de logique seraient utiles.

 

Actions sournoises  

Ce qui est le plus choquant dans le comportement d'une association comme L214, c'est la sournoiserie des attaques. En effet le nom même de l'association est hypocrite : ils ont pris pour nom le N° de l'article du code rural traitant de la protection des animaux [élevés ou entretenus par l'homme]. Ceci vise à laisser penser qu'ils militent pour le bien être des animaux d'élevage, alors même qu'ils ont pour objectif de voir disparaître tout élevage ! On ne peut pas s'intéresser en façade aux obligations légales visant à la bien-traitance des animaux élevés ou entretenus par l'homme et simultanément en arrière plan tout faire pour obtenir la disparition de tout élevage, l'action de façade devenant alors sans objet.

Dans la même veine d'action sournoise, leur slogan actuel est «non à l'élevage en cage». Si oublie que ce type d'élevage est le fruit d'environ 500 ans des travaux et d'observations ayant permis de passer du lapin sauvage au lapin domestique, et que l'on fait l'hypothèse que les éleveurs actuels abandonnent tous l'élevage en cage pour adopter un élevage "en liberté" (personne ne sait bien comment faire, ou surtout pas comment faire bien, mais passons) croyez vous que les membres de ces associations seront satisfaits ? Et bien non, ils laisseront investir les gens et ruineront immédiatement leurs efforts en déclarant qu'il ne faut pas sacrifier ces animaux pour les manger ! Ces associations prônent un type de modification (ne plus utiliser de cages et lancent des pétitions dans ce sens) et savent déjà que si ces modifications sont faites, ils feront immédiatement tout pour ruiner ceux qui auraient suivi leurs recommandations. Un comportement sournois proprement scandaleux.

Procès d'intention me direz vous. Non simplement lecture de leurs déclarations écrites et publiées.

La plus grande vigilance est recommandée vis à vis des actions des associations portées vers ce type d'extrémisme selon lequel l'homme devrait à toute force devenir végétarien strict.

Relations entre l'homme et les animaux  

Heureusement certaines associations plus pragmatiques déploient tous leurs efforts pour que l'homme et l'animal puissent cohabiter en respectant la nature des uns comme celle des autres : l'homme est une espèce omnivore adaptéeà cette situation biologique depuis plus de 100 000 à 200 000 ans (consommation de végétaux et de viande), les lapins et les vaches sont des herbivores, les chiens et les chats sont des carnivores, etc... n'en déplaise aux individus qui voudraient qu'il n'y ait plus sur terre que des herbivores . Les personnes en charge de l'élevage, du transport comme de l'abattage des animaux pour le compte des autres (chacun ne peut plus aller chasser le gibier nécessaire à sa famille) se doivent de veiller à bien traiter les animaux dont ils s'occupent et ce jusqu'au stade ultime.
Par contre, n'en déplaise aux âmes sensibles probablement trop éloignées de la nature, l'homme est une espèce dont la biologie est adaptée à la consommation de viande et donc au sacrifice des animaux qui fournissent cette viande. Prétendre le contraire c'est dénaturer la réalité au nom d'une idéologie et tout aussi condamnable que de prétendre que le soleil tourne autour de la terre ou que les camps d'extermination nazi n'ont pas existé.

Constater que certaines personnes peuvent effectivement vivre sans consommer de produits animaux (ni viande, ni lait, oeuf ou fromage, ni poissons, mollusque ou crustacés) et prétendre qu'on doive en faire une règle de vie pour tous, c'est aussi absurde que de constater qu'il est possible de traverser la rivière en marchant sur un fil et prétendre que l'on doive supprimer tous les ponts et les remplacer par de simples fil tendus entre les deux rives. Que certains choisissent le fil de fer pour traverser, libre à eux, mais ils n'ont pas à interdire aux autres de construire un pont et de l'utiliser pour franchir la rivière en toute sécurité.

La cause ultime que prétendent défendre les "fildeféristes" de L214 étant absurde et dangereuse pour la santé publique, il convient de tout faire pour les empêcher de nuire, tout en soutenant ceux qui militent pour une amélioration de la "bien-traitance" des animaux d'élevage dans le respect de la biologie des uns comme de celle des autres.

   
 
     
 
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