CUNICULTURE
Magazine Volume 32 (année 2005) pages 38 à 48

ASFC 10 mars 2005 - Journée d'étude « Puebla - Ombres & Lumières »
Reproduction et physiologie de la reproduction
au 8ème Congrès Mondial de Cuniculture

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II - PRODUCTION SPERMATIQUE  

Quelques communications de la session reproduction ont concerné la production spermatique en liaison avec les effets génétiques (2 communications) et les apports alimentaires (3 communications). Quelques communications présentées dans d'autres sessions ont été ajoutées.

 

Sélection pour vitesse de croissance élevée

concentration semence

 % éjaculats éliminés

volume et motilité de la semence

nombre de spermatozoïdes "utiles" par éjaculat ( - 25%)
1 - Production spermatique et effets génétiques
Brun et al. ont mesuré les effets d'une sélection divergente sur le poids à 63 jours (lignées haute et basse), sur l'aptitude des mâles à donner de la semence et sur les caractéristiques de la semence évaluées visuellement ou par analyse d'images. La réponse à la sollicitation ne dépend pas de la lignée. Par contre, le pourcentage d'éjaculats éliminés (causes : présence d'urine, volume < 0,4 ml ou motilité massale < 5) est plus élevée pour les mâles de la lignée haute à croissance rapide que dans la lignée basse (55,8 vs 33,5 %). En moyenne, la concentration de la semence en spermatozoïdes est plus importante pour les mâles de la lignée haute alors que la motilité massale, le volume et la vitesse des cellules sont plus élevés pour les mâles de la lignée basse. En conclusion, le nombre de spermatozoïdes "utiles" par éjaculat (critère synthétique qui prend en compte le nombre de spermatozoïdes mobiles par éjaculat et l'aptitude d'un éjaculat à être sélectionné pour l'insémination) est significativement plus élevé pour la lignée basse (229 vs 170 millions de spermatozoïdes utiles /éjaculat). Une relation génétique est donc mise en évidence entre vitesse de croissance et production spermatique.
S'il existe des différences entre lignées pour la qualité de la semence, dans ce cas le croisement apporte peu d'amélioration

Il faut citer la communication présentée par Garcia et al. au cours de la session de génétique. A partir de 2 lignées de lapins C et R sélectionnées sur la vitesse de croissance, et un plan de croisement diallèle complet, ces auteurs ont mis en évidence des effets génétiques directs et des effets maternels sur quelques caractéristiques de la semence. Comme dans le cas précédent des différences significatives entre lignées ont été trouvées par exemple pour le nombre de spermatozoïdes totaux par ml ou par éjaculats (ex. : 358 et 236 millions par éjaculat pour C et R) , comme pour leur taux de viabilité (73,0 et 84,3 pour C et R). Un effet maternel direct a été démontré pour le volume de l'éjaculat (favorable à la lignée C) et pour la concentration de la semence (favorable à la lignée R). Enfin, le croisement n'entraine d'effet d'hétérosis significatif que sur le pourcentage de cellules ayant une gouttelette cytoplasmique proximale et sur le pH de la semence.
Par ailleurs, les caractéristiques de la semence de 9 mâles Californiens, Néo-Zélandais ou Chinchilla ont été évalués à l'Université de Chapingo à Mexico. Les mâles de souche californienne ont produit le plus grand volume de semence, cependant, leurs spermatozoïdes étaient en moyenne moins motiles. Comparés aux deux autres races étudiées, les 9 mâles de race californienne ont produit en moyenne un nombre de doses d'insémination plus faible (Salcedo-Baca et al.).

 

Les effets de l'apport alimentaire de zinc mériteraient de plus amples investigations 2 - Production spermatique et apports alimentaires
Rizzi et al. ont montré qu'un régime alimentaire contenant une forte concentration en sodium pendant 3 cycles de reproduction n'a pas d'influence sur les performances de reproduction des mâles, ni sur les caractéristiques biochimiques de leur semence. (Il a été vu plus haut que ce même régime a très peu d'influence sur la physiologie ou la reproduction des femelles)
Une supplémentation en zinc est susceptible d'améliorer la spermatogenèse. En effet, Oliveira et al. (Brésil) ont montré que la supplémentation de la ration alimentaire de jeunes lapins (à partir du sevrage et pendant 34 semaines) avec 0, 50, 100, 150 ou 200 ppm de zinc (ZnO) permet d'augmenter significativement le volume de spermatozoïdes récoltés (estimation indirecte du nombre de spermatozoïdes) avec l'apport de 150 ppm . Les autres apports de Zn conduisent à des accroissements non significativement différents des valeurs obtenues avec le régime de base (sans d'addition de ZnO mais à teneur inconnue en Zn - peut être était-il carencé en Zn ?). Les différents apports de zinc n'ont entrainé aucune modification significative du volume des éjaculats et on peut regretter que la qualité de la semence n'ait pas été étudiée dans ce travail.
Une supplémentation de la ration des lapins en acide linolénique (oméga 3) permet d'obtenir une semence plus vigoureuse

L'accroissement de la teneur en acide alpha-linolénique (5% graines de lin extrudées) et en vitamine E (+200 mg/kg) de l'alimentation des mâles s'accompagne d'une amélioration de la qualité de leur semence : pourcentage de cellules vivantes, vitesse de déplacement, déplacement latéral de la tête et n'altère pas la réaction des cellules à un choc hypotonique. Le volumes des éjaculats et la concentration en spermatozoïdes ne sont par contre pas modifiés par l'apport d'acide gras n-3 (=oméga 3) (Castellini et al. ).
Enfin, Zaniboni et al. ont déterminé et comparé la composition en lipides et en vitamines des différentes fractions de la semence de lapins (spermatozoïdes, plasma séminal et granules).

 

III - EVALUATION, TRAITEMENT ET CONSERVATION DE LA SEMENCE

1 - Evaluation de la semence
Les effets de la congélation sur les membranes des spermatozoïdes, ont été étudiés en utilisant un test de double coloration (bleu de trypan et Giemsa) avant congélation puis après congélation et réchauffement (Polgàr). Ces tests permettent d'évaluer la viabilité des cellules, l'intégrité de l'acrosome et du flagelle. La congélation suivie du réchauffement à 37°C a augmenté le pourcentage de cellules mortes de 18 à 46 %. De plus, les cellules vivantes présentent des anomalies de membranes au niveau de l'acrosome et du flagelle. Si les effets de la congélation ne dépendent pas du jour de collecte, les auteurs mettent en évidence des effets mâles sur l'aptitude à la congélation.

 

Avec un dilueur adapté contenant de la gélatine, il semble possible de conserver à température ambiante (15°C) de la semence de lapin pendant 72 heures sans affecter son pouvoir fécondant de manière importante.

2 - Traitement et conservation de la semence
Par rapport à la semence observée immédiatement après récolte, 24 heures de conservation de la semence à 5°C dans une solution saline (Tris - EDTA - acide citrique) n'affecte ni la motilité, ni la rectitude du déplacement des cellules (Badù et al.), cependant, le pourcentage de gouttelettes cytoplasmiques augmente (15,0 vs 11,4 %) .
Echegaray-Torres et al. ont étudié la viabilité et la fécondance de la semence diluée et conservée à 15°C dans un dilueur contenant de la gélatine. La semence était diluée afin de réaliser des doses de 0,5 ml contenant 20 millions de cellules. La température était ensuite abaissée (0,33°C/mn) jusqu'à 18°C puis la semence était conditionnée en paillettes. Bouchées avec de l'alcool polyvinylique, ces dernières étaient ensuite stockées dans un thermos contenant de l'acide acétique à 15°C. Toutes les 24 heures après le conditionnement, les caractéristiques de la semence étaient évaluées (motilité, pourcentage des spermatozoïdes vivants et normaux). La semence conservée 24, 48 et 72 heures était ensuite utilisée pour inséminer des lapines allaitantes, préalablement stimulées par une séparation de leur portée pendant 48 heures. La conservation affecte les caractéristiques de la semence en particulier la motilité 72 heures après conservation. Cependant, la fertilité n'est diminuée que de façon non significative (84, 73 et 70% respectivement pour 24, 48 et 72 heures de conservation). Les auteurs concluent que ce dilueur contenant de la gélatine permet donc de conserver la semence à 15 °C pendant 3 jours, il faut cependant préciser, que seulement 20 femelles réceptives ont été inséminées par lot.

 

IV - BIOTECHNOLOGIES et REPRODUCTION

 

La congélation rapide des embryons par vitrification donne, après implantation chez une lapine receveuse, des résultats à peine inférieurs à ceux obtenus après un transfert d'embryons frais.

Au cours de la session reproduction, une seule communication a concerné les biotechnologies de la reproduction appliquées au lapin. La congélation des embryons est utilisée en particulier pour la conservation de ressources génétiques. La vitrification est une technique de congélation rapide qui fait intervenir des concentrations importantes de cryoprotecteurs. Cette technique est plus simple et moins onéreuse que les techniques classiques de congélation d'embryons mais elles pourrait altérer le développement des embryons. Moce et al. ont étudié l'effet de cette technique sur la fertilité et le développement des embryons après transfert sur des lapines receveuses. La vitrification n'affecte pas le taux de réussite du transfert ( 85 vs 80 %), par contre la mortalité immédiate après implantation est augmentée : sur 8 embryons frais transférés dans une corne utérine 4,83 sont vivants au 17e jour contre 3,68 pour les embryons vitrifiés (P<0,05). A 28 jours de gestation, les chiffres équivalents sont de 4,55 et 3,66 (moyennes ajustées, écart non significatif).

 

V - MAÎTRISE DE LA REPRODUCTION DANS LES CLIMATS CHAUDS

Dans des conditions sub-tropicales (Egypte), Marai et al. ont étudié 4 programmes lumineux (lumière naturelle, 16L:8D, 12L:12D, 8L:16D) sur la croissance de jeunes lapines et certains paramètres physiologiques et métaboliques (14 lapines par lot suivies de 12 à 20/22 semaines). L'expérience a été divisée en 2 périodes : janvier à mars (température moyenne de 19°C à midi) puis juin à août cette seconde période étant caractérisée par une chaleur intense (33°C en moyenne à midi). Les fortes chaleurs affectent la croissance (GMQ de 16,3 vs 21,0 g/j), les paramètres de thermorégulation, la consommation d'aliment (-33%) et d'eau (+46%), ainsi que les métabolites sanguins plasmatiques. Seuls les facteurs endocriniens mesurés (T3 et cortisol) ne sont pas affectés. Les jeunes lapines élevées sous 8 heures de lumière ont une croissance identique à celle des lapines élevées en lumière naturelle (20,8 g/j), meilleure que celle des lapines exposées à 16 heures de lumière par jour (16,5 g/j). Leur taux de cortisol sanguin (5,6 ng/ml) est le plus faible, significativement inférieur à celui des lapines élevées sous 16h de lumière (7,5 ng/ml) ou en lumière naturelle (9,6 ng/ml).

 



Exemples de lapins de la population locale Kabyle (Algérie)

Belhadi a analysé sur une population locale algérienne en Kabylie, quelques facteurs susceptibles d'influencer la taille de portée, la mortalité des jeunes de la naissance à 70 jours ainsi que le poids de portée à 70 jours. La reproduction était arrêtée du 10 juillet au 31 août. Le poids des lapines à la saillie n'influence ni la taille de portée, ni les mortalités. Alors que les mortalités ne sont pas influencées par la saison, au printemps, les tailles de portée et les poids de portée sont supérieurs à ceux de l'automne. Les lapines primipares allaitantes ont les plus grandes tailles de portée alors que des mortalités plus élevées sont observées chez les primipares allaitantes et les multipares non allaitantes.
Zerrouki et al. ont analysé les performances de reproduction de cette même souche locale sur une période de 6 ans. Ces lapines se caractérisent par un poids adulte et une prolificité modestes (respectivement 2,8 kg et 7,2 nés totaux/MB). Mises à la reproduction à l'âge de 4,5 mois et saillies 11 jours post partum, leur taux d'acceptation de l'accouplement et leur fertilité sont respectivement de 74,3 et 73,3 %. La chaleur estivale n'affecte ni la fertilité ni la prolificité, seul le poids de portée au sevrage est diminué (- 11 %, comparé à la moyenne des poids aux 3 autres saisons). Durant les 21 jours suivant 299 mises bas, la production laitière moyenne a été de 2180 g (104 g de lait par jour). La production laitière des mères s'accroît régulièrement avec la taille de la portée, mais la capacité maximale de production est atteinte avec 7 lapereaux par portée dans cette population. D'autre part, le rang de portée n'influence pas de manière significative la quantité de lait disponible par lapereau et par jour dans cette population (Zerrouki et Lebas). Le prix de la meilleure communication de la session reproduction a été attribué à ce dernier travail.

 

CONCLUSION

Afin de répondre aux attentes des consommateurs et à l'évolution prévisible de la réglementation européenne concernant l'utilisation des hormones exogènes, la recherche d'alternatives à l'utilisation d'hormones pour induire et synchroniser l'oestrus des lapines a fait l'objet de différentes communications et sera poursuivie.
Il faut souligner la participation active des physiologistes au 8ème Congrès Mondial de Cuniculture. C'est un point important car une meilleure compréhension des mécanismes physiologiques permettrait de mieux contrôler la reproduction chez le lapin.
Dans les travaux présentés, il faut remarquer enfin, la prise en compte de plus en plus marquée non seulement de la productivité des reproductrices mais aussi de leur longévité (durée de production) en relation avec la viabilité et la croissance des jeunes sous la mère. Tous ces aspects sont des éléments qui intègrent l'intérêt du producteur mais aussi la notion "d'agriculture durable" par une meilleure prise en compte de la santé des animaux, de leur bien être ainsi que de la sécurité alimentaire humaine.

 
 
 
(Rappel : le texte intégral de toutes les communications de ce Congrès est disponible gratuitement sur le site web de la WRSA : http://world-rabbit-science.org/) . Ces textes sont tous rédigés en anglais.
 
     
 
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